Arrivé à la surprise générale début juillet à la suite du départ non moins surprenant de Jorge Sampaoli, Igor Tudor aura mené l’OM à une saison aux émotions diverses, mais toujours intenses.
Une révolution réussie
Si il est un point difficilement contestable, c’est que le technicien croate a débarqué en Provence avec des idées aux antipodes de celle de son prédécesseur argentin. Par sa force de conviction et son charisme il a su les imposer à ses joueurs. Ils se sont rapidement épanouis dans cette nouvelle identité.
Finis le jeu latéral, les passes neutres à excès, la passivité collective, fini l’ennui. L’OM nouveau est arrivé, celui dans lequel tout espace est perçu comme une opportunité offensive à saisir au plus vite. Les olympiens font grandement honneur à la devise du club. Igor Tudor surprend, même épate, les supporters, les observateurs et les entraîneurs adverses par son culot. Il remet à jour, avec succès, un concept tactique et idéologique d’un autre temps : le marquage individuel tout terrain.
Cette identité axée autour du rapport de force et du culot est vecteur de fierté et de grandes émotions. En cela l’équipe reflète à la perfection l’ADN de ce club si passionné et passionnant qu’est l’OM.
Des choix d’hommes de plus en plus contestables
Si la révolution Tudor fut une réussite, ses choix individuels laissent plus à désirer et ont joué un rôle majeur dans la dégradation tardive des résultats.
Ses choix d’abord surprenants, ont longtemps été légitimés par le jeu et les résultats. La mise à l’écart du onze de départ de l’idole Dimitri Payet fut signe du grand caractère et des convictions assumées du technicien croate. Le décalage entre le style physique et vertical du jeu à la Tudor, et la condition physique et l’âge du numéro 10 marseillais, légitime ce choix.
On peut même dire que voir Mattéo Guendouzi sur le banc s’expliquait par moment, même si ce dernier est intrinsèquement le meilleur milieu marseillais. En effet, malgré un manque certain de créativité, le duo Rongier-Veretout a eu d’excellentes périodes et a pu représenter une force majeure pour l’équilibre et la fluidité tactique de l’équipe.
Mais quand cet OM dépendant beaucoup sur le physique montra des signes de fatigue, Igor Tudor aurait dû être moins rigide dans ses choix d’hommes. Malgré un faible temps de jeu, Guendouzi et Payet ont su apporter en fin de saison de la créativité, des actions décisives, tout ce que ne faisaient plus les autres (tant le duo Rongier–Veretout que Ruslan Malinovskyi). Qu’ils aient joué que 20 minutes dans le match crucial à Lens où l’OM fut médiocre en seconde mi-temps, et que Guendouzi ait été laissé sur le banc tout le match à Lille (et de manière cruelle avec un échauffement en vain), est inexplicable et inexcusable.
On peut aussi mettre en avant le choix lunaire sur la phase retour de se passer régulièrement d’un des deux meilleurs joueurs de l’OM cette saison (l’autre étant Alexis Sánchez) : l’irréprochable et brillant Chancel Mbemba.
Des résultats ambivalents
La première chose à mettre en lumière au moment d’aborder les résultats est que la saison fut bien meilleure que ce dont pouvait faire présager le climat de pré-saison. Malgré tous les reproches qu’on peut faire au coach dalmate, la constance de l’OM cette saison (tant au niveau du jeu que des résultats) rend les sifflets d’une partie du Vélodrome avant le premier match officiel encore plus sots que ce qu’ils étaient déjà.
L’OM d’Igor Tudor avança très longtemps à un rythme absolument remarquable en Ligue 1, un rythme historique pour l’OM depuis la mise en place de la victoire à 3pts. Les 4 défaites lors des 5 derniers matchs noircissent forcément le tableau, mais malgré cela les supporters phocéens ont vécu une saison de Ligue 1 de grande qualité, avec un jeu plaisant et excitant, un rythme oscillant très longtemps entre 2 et 2,3 points par match, et une présence quasi-permanente sur le podium. Les derniers matchs et la défaite dans la course à la 2ème place laissent un arrière-gout amer, mais qualifier la 3ème place d’échec et parler de saison ratée serait injuste.
Par contre les deux parcours en Coupe eux symbolisent bien cette saison dans laquelle, malgré une réelle constance, quelques moments clés assombrissent un bilan qui aurait pu être éclatant. Les dernières secondes lunaires de ce match pourtant magnifique contre Tottenham, représentèrent le premier coup de massue sur les espoirs olympiens. L’impardonnable élimination à domicile contre Annecy, équipe de bas de tableau de Ligue 2, fut le second. Le fait qu’il soit consécutif au meilleur match de la saison et la plus grande émotion, c’est à dire la victoire au tour précédent au Vélodrome face à l’ennemi juré parisien, évoque à nouveau une saison où de grands et légitimes espoirs furent terrassés.
Le bilan d’Igor Tudor n’est ni brillant ni médiocre, la vérité se trouve entre les deux. Par ses idées il a donné bien plus d’émotion que son prédécesseur, et l’OM fut longtemps d’une constance rare en Ligue 1. Mais des moments clés mal gérés, avant tout par le natif de Split, rendent la saison infiniment moins grande que ce qu’elle aurait pu être. À son successeur de faire mieux…