Il a eu la chance d’être aux commentaires d’une affiche qu’il n’oubliera jamais ! Philippe Carayon, journaliste sur les antennes de Canal+ depuis 2007, a décidé de prendre le temps et de se confier sur la soirée exceptionnelle qu’il a vécue le 18 avril dernier, dans un Vélodrome plein à craquer.
Quand tu apprends que tu vas commenter un match au Vélodrome, quelle est ta réaction ?
Evidemment, je suis super excité, et très heureux. Alors attention, j’adore mon boulot, tous les matchs m’intéressent mais pour être honnête, quand tu sais que tu commentes un match au Vélodrome, c’est spécial. Il y a une excitation particulière.
Par rapport à l’ambiance ?
Oui ! En fait, ce stade et cette ambiance sont quand même uniques. Même si je trouve qu’en France on a vachement progressé dans les tribunes. Mais Marseille ça reste Marseille. Déjà qu’un match normal c’est bien, mais alors une rencontre importante au Vélodrome, tu es au sommet de l’excitation et de la passion.
Avant le coup d’envoi d’OM vs Benfica, tu t’attendais à vivre une soirée spéciale ?
J’étais clairement passionné par cette affiche. Encore plus après le match aller et un résultat (2-1) qui était parfait pour le suspense. Moi j’étais convaincu que ça allait passer pour l’OM. Le seul truc qui m’a fait un peu douter, c’est la veille quand j’ai appris que Clauss et Sarr n’étaient pas dans le groupe.
Aux commentaires, on t’a vraiment senti confiant pour l’OM. Tu le confirmes donc ?
Oui ! De plus, je savais qu’il n’y avait qu’un but d’écart donc tu te dis qu’il ne suffira que d’un but. La première mi-temps ne m’a pas inquiété car c’est normal que l’OM ne parte pas à l’assaut. Souvent, l’OM s’était raté dans les grands rendez-vous, et je me suis dit que si ça doit tourner, ce serait ce soir-là.
Les supporters se sont régalés de tes commentaires, surtout sur ton « OH LA LA LA LALALALALALA »…
Alors tout ça c’est complètement spontané et improvisé. Ce qui se passe, c’est qu’à partir de la seconde mi-temps, on a eu droit au scénario dont on a rêvé. Entre l’égalisation, les prolongations, les TAB, il y a eu un ensemble de trucs qui ont fait que le scénario a totalement dépassé nos espérances. Je suis sûr que ce match restera gravé à jamais. Je pense que ce OM vs Benfica s’inscrira encore plus dans les mémoires, autant, voire même plus, que le OM vs Leipzig (5-2) en 2018 !
Ah oui ? Explique nous pour quelle(s) raison(s) ?
Là où ce match est complétement fou pour moi, c’est qu’on a le scénario sportif. C’est un peu le scénario de rêve car aller jusqu’aux TAB, c’est la perfection du suspens. Mais il y a deux autres dimensions incroyables, c’est l’état des joueurs : je n’ai pas le souvenir dans le football d’avoir vu autant de joueurs éclopés, victimes de crampes mais tous prêts jusqu’au bout à mourir sur le terrain. La troisième couche c’est de voir rentrer les deux minots (Daou et Lafont). C’est tellement dingue de voir deux gamins qui avaient à peine fréquenté le groupe professionnel quelques heures avant, et qui disputent leurs premières minutes chez les pros, en 1/4 de finale d’Europa League ! C’est pour ces trois raisons que ce match restera inoubliable.
Tes commentaires ont aussi aidé à nous faire vivre cette soirée exceptionnelle !
Alors attention, dans mes commentaires je suis dans les normes. Je m’applique à être très factuel et le plus précis possible. Par contre, quand il y a de l’émotion, en tant que commentateur, je trouve que c’est mon rôle de devoir la faire partager. Il faut être normal quand le match est normal mais quand ça s’accélère, tu dois être à la hauteur du match que tu commentes. Puis on était un trio ! Moi, Alain Roche et Laurent Paganelli, en homme de terrain. On a tous les trois vibré de la même façon. C’était génial quoi…
C’est vrai ! Et même Alain Roche semblait être à fond derrière Marseille non ?
Tu veux une petite anecdote ? Je n’ai jamais vu Alain Roche aussi ému qu’à la fin du commentaire quand il a posé le casque. Il avait les larmes aux yeux et il m’a dit : « Si tu savais comme ce genre de match c’est incroyable ! Ça m’a rappelé certains matches de ma carrière, quand tu gagnes de cette façon-là, c’est extraordinaire… ». Ça m’a touché de le voir comme ça. Il était profondément ému.
Cette soirée c’est ton meilleur souvenir en rapport avec l’OM ?
Dans ma « modeste » carrière, ce match c’est mon graal. J’ai eu ou on a eu la chance de commenter le match qu’on a rêvé de vivre. C’est mon meilleur souvenir de commentateur.
Tu avais aussi commenté le but extraordinaire de Payet contre le PAOK.
Ah oui ce but ! Fantastique… Ce qui est fou, en plus de la beauté du but, c’est que j’étais avec Florent Sinama-Pongolle, Réunionnais et pote de Dimitri Payet ! Et au moment du but, avec l’émotion, il commence à parler en Réunionnais (rire). Ça s’entend dans les commentaires si on y fait bien attention. A Marseille j’ai de la chance quand même !
Tu as un peu suivi les réactions sur les réseaux sociaux et les vidéos de tes commentaires qui circulaient en boucle ?
J’ai Instagram, j’y poste des trucs un peu rigolo mais je ne suis jamais allé sur Twitter par exemple, pour plusieurs raisons, les débats inutiles, les haters… Après, quand on me dit que sur Twitter les gens se sont régalés, c’est plaisant évidemment et je suis le premier heureux. Mais ça n’est pas ma première satisfaction.
Quelle est ta première satisfaction ?
C’est de savoir que tu as bien fait ton métier. Le reste c’est qu’une boule de neige en plus quoi (rire).
Ce match va apporter quoi à la saison de l’OM ?
Ce match restera car il a apporté de la satisfaction, un résultat important et du bonheur aux supporters alors que le club est en plein cœur d’une saison décevante.
L’OM doit prioriser l’Europe maintenant ?
J’ai bien vu que les gens du club ne veulent pas lâcher le championnat. Je comprends très bien ce discours. Mais moi ça me titillerait volontiers d’axer les choses sur la Coupe d’Europe. Pour moi, l’histoire n’est pas terminée. Imaginons tu la gagnes c’est le graal et tu te qualifies pour la Ligue des Champions.
L’OM reste une aubaine pour les diffuseurs de football n’est-ce-pas ? Avec aussi un club qui évolue dans la capitale.
Alors je ne peux parler au nom de la chaîne mais Marseille et Paris sont les deux clubs les plus populaires. J’ai eu la chance d’être spécialiste du club pendant quelques saisons (période Labrune), j’étais très souvent envoyé là-bas. J’ai vécu de très près la finale et le parcours de 2018. Quand tu deviens un suiveur de l’OM, tu t’aperçois très rapidement de l’incroyable popularité de ce club. Les matins des gros matches, on voit déjà le Vieux-Port rempli de maillots marseillais ! Et ils viennent tous des quatre coins de la France. Tout ça c’est la grande force de l’OM.
On peut terminer sur une anecdote ?
Mon père (Jean-Pierre Carayon) qui nous a quittés et qui était l’entraîneur du Perpignan FC, m’a fait assister à un OM vs Perpignan (1995) sur le banc de touche, au bord de la pelouse. Mon tout premier souvenir au Vélodrome c’est celui-là ! D’après toi, j’étais dans quel état ? En plus moi, je n’avais pas l’habitude des grands stades. J’étais impressionné, les frissons et tout ce que tu veux… Un autre monde quoi. Autre anecdote sur mon père : Il était aussi le coach de Thonon et avait affronté l’OM lors du mythique OM-Thonon de 1984. C’était le match historique de la remontée des minots.
Philippe Carayon qui nous a régalés dans ses commentaires, l’a également fait dans cet entretien rempli de franchise. Un grand merci à lui ainsi qu’à son employeur pour avoir accepté cet échange hautement intéressant. En espérant qu’il continue de nous faire vibrer dans un futur proche !