Fondateur du « Club des 5 » (@LeClubDes_5) mais également éditorialiste pour Winamax et Yahoo. Walid Acherchour (@walidacherchour) a accepté de répondre à nos questions. Différents points seront abordés tels que son parcours, son opinion sur la Ligue 1 ou encore son avis sur l’Olympique de Marseille. L’interview a été réalisée par Thomas Depaix-Dumas (@DepaixDumas).
Quel est votre parcours ?
J’ai eu mon Bac, et à la suite de cela je devais faire du commerce mais j’ai trouvé une école de radio. Je me suis inscrit et j’ai fait une année mais cela n’a pas matché. Je me suis tourné vers une école de journalisme plus traditionnelle qui est l’IEJ. En marge de ces deux années, j’étais dans une web radio dans laquelle on recevait des invités de marque tels que Vincent Duluc, Alexandre Ruiz ou encore Daniel Riolo.
J’ai arrêté mon école de journalisme au bout de ma 2ème année. En janvier 2017, j’ai eu l’opportunité de faire une émission sur France Info avec Matteu Maestracci pour la finale de la Coupe d’Afrique des Nations, Égypte-Cameroun, c’était ma première émission. J’ai poursuivi cette émission pendant 6 mois. Pascal Praud m’a contacté pour une émission sur CNews qui a duré jusqu’à la Coupe du Monde 2018 (1 an et demi).
Entre temps, j’ai créé « le club des 5 » avec trois collègues de CNews. À présent, je suis éditorialiste pour Yahoo et Winamax.
Quel est votre souvenir le plus fort dans le football ?
C’est dur de n’en ressortir qu’un. Mon premier gros souvenir, c’est le but de Trezeguet lors de la finale de l’Euro 2000 face à l’Italie. C’était la première grosse compétition que j’ai vécu avec ma famille. Je me souviens surtout du quart de finale face à l’Espagne, la demi-finale contre le Portugal et ensuite la finale.
Vous aviez évoqué le fait de vouloir devenir journaliste dans le football assez tôt, quelles ont été les réactions de vos professeurs ?
Que ce soit dans ma première année de radio ou ma deuxième année de journalisme, nous n’avions pas la même façon de voir les choses. Je n’avais pas ce côté généraliste qui est demandé. Souvent, je disais à mes professeurs que je souhaitais devenir éditorialiste dans le football, je comprends que cela pouvait leur poser problème.
Je leur disais que si un employeur venait me chercher c’est parce que j’étais l’un des meilleurs dans mon domaine. L’objectif n’était pas d’être pas être bon partout sans exceller dans un domaine en particulier, j’aurais été noyé dans la masse. Puis je me suis concentré à 100% sur le football. Heureusement que j’ai eu cette opportunité à France Info. Si j’avais dû rentrer dans le moule, j’aurais quitté le journalisme. Si tu n’as pas cette spécialité, tu deviens une personne lambda.
Maintenant, j’ai eu cette réussite. Aujourd’hui je peux vivre de mon métier, même si je sais que ma situation est précaire pour le moment.
À quel moment vous avez décidé de créer votre émission « Le Club des 5 » ?
C’est une idée qui a mûri entre nous (Romain Beddouk, Bilal Achour-Tani, Samuel Vaslin). Nous avions déjà notre web radio ensemble. On avait un animateur qui nous a quitté car nous n’avions pas la même vision des choses en terme de ligne éditoriale. À chaque fois que des intervenants qui travaillaient dans les médias venaient, ils nous disaient que l’on avait une vraie analyse, une vraie complicité, que l’on parlait de certains clubs méconnus, que l’on arrivait aussi bien à décrypter un match de Bundesliga que de Ligue 1.
Les limites étaient la visibilité : à part nos proches, peu de personnes nous écoutaient. On a démarché un studio, fait une quotidienne sur Youtube. Cette plateforme nous permet d’être écouté aussi bien à Madagascar qu’aux États-Unis. On a pris nos « cojones », on a débuté sans réalisateur, sans rédacteur en chef, nous n’étions que des passionnés. Puis on a dépassé les 600 émissions, on a 50 000 abonnés. On voulait devenir une émission qui compterait dans le paysage médiatique.
Ensuite, on voulait donner de l’importance aux autres championnats comme les « drôles de dames » chez RMC ou L’Équipe du Soir. Mais ces médias restent centrés en Ligue 1. Plus jeune, j’aimais Ronaldinho au Barça, Zidane à la Juve ou au Real, Henry à Arsenal. La nouvelle génération préfère des joueurs comme De Bruyne, Lionel Messi ou encore des clubs tels que Manchester City et le FC Barcelone plutôt que la Ligue 1. On essaie de donner de l’importance à ces championnats qui le méritent.
Voyez-vous « Le Club des 5 » comme un concurrent direct des émissions de « talk » telles que l’Équipe ou RMC ?
Non, on ne pourra jamais les concurrencer. RMC et L’Équipe ont déjà des audiences extraordinaires, ils sont sur la TNT. Nous, on doit démarcher avec très peu de moyens, nous sommes une offre supplémentaire. Avec un ton nouveau, on est une émission différente. Sauf que demain tu auras un débrief d’un match (exemple: Dortmund-Francfort). Au lieu d’avoir 3 minutes de débrief avec Simone Rovera ou Polo Breitner on va essayer de donner 20-25 minutes de débrief.
Nous sommes une offre différente, avec généralement un ton différent avec des jeunes personnes car nous avons entre 23 et 33 ans. L’offre footballistique est tellement large qu’il y a de la place pour tout le monde, nous faisons notre petit bout de chemin, on essaie d’analyser de notre façon avec la plus grande humilité possible, ensuite si on attire une communauté tant mieux.
L’émergence des émissions via Internet semble subjuguer les nouvelles générations aux dépens des émissions plus traditionnelles (RMC/L’Équipe), pouvez-vous l’expliquer ?
C’est une offre différente, un mode de fonctionnement différent. On a une grosse fanbase de 15-30 ans qui regarde sur le téléphone ou sur la télé avec YouTube. On parle plus en profondeur des clubs qu’ils apprécient. C’est un nouveau discours. Beaucoup n’apprécient pas le fond de certains consultants. Aujourd’hui, on ne peut pas duper un supporter, il sait si tu suis les matchs. Beaucoup ont remarqué que certains consultants n’ont pas la même assiduité dans la faculté à regarder les matchs, nous nous imposons cette exigence.
Au quotidien, sur des émissions un peu mainstream (grand public), ça fait la différence. Le phénomène YouTube s’explique par ces facteurs-là. Personnellement, je le vois à travers moi. Il y en a beaucoup qui m’ont dit « enfin un éditorialiste qui parle foot, qui parle vrai et qui regarde les matchs » même si certains ne sont pas d’accord avec moi.
Avez-vous le sentiment que le niveau de la Ligue 1 baisse ?
Il est assez irrégulier. On a la capacité de faire des exploits comme la finale de l’OM, Monaco en demi-finale de Ligue des Champions en sortant City et Dortmund. Lyon en demi-finale d’Europa League. Mais derrière, en s’inclinant face à Manchester United B voire C ou en se noyant face à Alexandria ou Cluj, en faisant des résultats en Europa League, je le répète, très irréguliers, on peut voir Rennes battre le Betis Séville, qui était intéressant, mais l’année suivante ils se font battre par Cluj. Et quand tu vois le début de saison, il y a un nivellement vers le bas.
En même temps, tu formes des joueurs qui explosent dans les 5 championnats (exemple: Marcus Thuram qui était 20ème en Ligue 1 et qui crève l’écran avec le Borussia M’gladbach). C’est dur d’analyser car dès que nos joueurs changent de contexte ou sont confrontés à une autre idée de jeu, chez nous, ils ont du mal à s’exprimer ou à trouver cette régularité et cela se retransmet dans le collectif.
Pour moi, dans les 5 grands championnats, la France est un cinquième fragile.
André Villas-Boas a réussi à battre Lille et Lyon, pensez-vous qu’avec un groupe aussi restreint l’OM peut jouer le podium ?
Je pense qu’avec cette Ligue 1, l’OM peut finir sur le podium. Il a pris de l’avance sur Lyon et Monaco. Ils ont réussi à battre Monaco avant que la dynamique s’enclenche chez les Monégasques. Ils ont battu Saint-Étienne, même si c’était difficile, mais également Nice qui était un concurrent au début de la saison. André Villas-Boas a montré qu’il avait les capacités ainsi que des idées de jeu. Cela va dépendre de la qualité de l’effectif, des blessures ou des suspensions. Au début de la saison, je me suis dit que ça allait être dur de finir sur le podium au vu du manque de recrutement et avec ce que l’on a vu sur les 3 premiers mois (ex : Amiens). Il a la capacité pour le faire, il a des joueurs très intéressants ainsi qu’une colonne vertébrale de qualité.
Dimitri Payet revient bien de sa suspension, en témoigne notamment son match face à Lyon. Peut-il enfin faire une saison complète ?
Il en a la capacité. Je le dis souvent dans les émissions, s’il était régulier et qu’il marquait 20 buts et faisait 15 passes décisives, il ne serait pas à Marseille. Sans cette irrégularité, il serait à Manchester City. Il a d’énormes qualités il est au-dessus de la Ligue 1 mais il a de grosses irrégularités. Ensuite, en regardant le début de saison je trouve que l’on est assez dur avec lui car il fait un gros match face à Lyon mais également contre Montpellier, Monaco, Nice, et même contre le PSG lorsque l’OM prend la marée 4-0, même si c’est un nivellement vers le bas c’est celui qui s’en sort le mieux.
Si aujourd’hui, l’OM fait un bon début de saison c’est aussi grâce à Dimitri Payet. Dans un registre qui n’est pas le sien (ailier gauche) d’autant plus à son âge, il arrive à s’adapter. Ensuite, on peut le critiquer sur sa suspension qui a amputé l’OM. Payet ne fera pas 38 matchs. Je le répète, si Payet était à ce niveau-là il ne serait pas revenu à Marseille après West Ham. Il serait aujourd’hui à City ou un club au-dessus, c’est l’histoire et la carrière de Dimitri Payet.
Avec des prestations abouties en tant que numéro 6, beaucoup militent pour voir Boubacar Kamara à ce poste. Quel est votre ressenti par rapport à cela ? Vous le préférez en sentinelle ou en défense ?
Je suis partagé car Garcia l’avait essayé à ce poste, je n’étais pas très fan, et ensuite il avait reculé au cours de la saison. Sur le début de saison avec Álvaro, c’était satisfaisant. Avec le début de saison très moyen de Strootman (et je suis gentil) tu n’as pas de numéro 6 et face à des grosses équipes il va t’handicaper, notamment quand tu n’as pas le ballon.
Depuis le match contre Lille, j’ai trouvé que c’était une très bonne idée et depuis il est très bon. Je vois des similitudes avec Marquinhos. Il a une belle relance, il est très propre et très peu de déchets. Il a également cette faculté à ratisser et être là au bon moment. Face à Lyon il fait un très gros match et une énorme première mi-temps, en chipant un ballon à Bertrand Traoré sur une grosse occasion qui aurait pu relancer le match. Sa polyvalence peut aider l’OM. Je suis pour Kamara en 6 et Strootman sur le banc.
Pensez-vous que le mercato estival de l’OM (Rongier, Álvaro et Benedetto) soit une réussite ?
C’est une réussite car les trois joueurs ont rapporté une plus-value dans le onze olympien. Je trouve Álvaro vraiment bon et même s’il s’est troué face à l’OL, je pense que cela ne reflète pas son bon début de saison. Ensuite, Benedetto pour être honnête, je ne suis pas le football sud-américain et j’entendais par-ci par-là qu’il avait des qualités. Je ne le voyais pas à ce niveau-là, même s’il commence à rentrer dans le rang avec une dynamique moins performante. Au contraire, Valentin Rongier, qui a commencé plus tard que les deux autres recrues, et c’est celui qui commence à prendre une vraie dimension au milieu de terrain.
Par contre, tu n’as pas remplacé le manque numérique : je pense aux latéraux, au poste de numéro 6 et aux ailiers avec la blessure de Thauvin, tu as très peu de solutions. Tu as joué avec Lopez et Germain sur un côté, même si cela a marché sur certains matchs ce n’est pas leur poste. Ensuite, André Villas-Boas a utilisé Bouna Sarr et Nemanja Radonjić.
Tu imposes à ton coach de faire du bricolage dans ses compositions, sur la qualité le mercato est réussi mais sur la quantité on peut être frustré.
En ayant un mercato hivernal sans recrue, est-ce que l’OM aura assez d’armes pour finir sur le podium ?
D’abord, tu récupères Thauvin. Si tu es 2ème à la trêve et que tu peux réajuster ton effectif, ce serait une très bonne idée de la part des dirigeants. Je suis très sceptique sur l’apport de Zubizarreta. Est-ce qu’il a travaillé sur ces profils, va t-il renforcer l’équipe ? S’ils ne l’ont pas fait cet été, je ne vois pas pourquoi ils le feraient cet hiver.
Quel est votre opinion concernant Jacques-Henri Eyraud qui entame sa troisième saison au club ?
Je suis très déçu de sa communication, du passage avec Garcia lors de la troisième année. Il aurait dû le licencier bien plus tôt, il a retardé l’échéance car il l’avait prolongé et cette erreur est fatale. Elle est imputable à Jacques-Henri Eyraud. Peut-être qu’en ayant choisi André Villas-Boas, il va pouvoir rectifier ses erreurs. Mais pour moi, lorsque l’on parle de Garcia, le premier fautif c’est le président qui n’a pas prévu la saison de trop, post « épopée européenne » (cela arrive dans beaucoup de clubs en Europe), et l’a prolongé trop rapidement.
On peut aussi revenir sur le choix d’Evra, de Payet à 30 millions, les transferts, de laisser un directeur sportif qui ne travaille que très peu avec des choix comme Radonjić, comme Strootman qui jouait sur une jambe à la Roma, il a fait 2-3 gros matchs dans la saison mais en Série A c’était très compliqué. Toutes ces erreurs sont imputables à Garcia mais aussi à Jacques-Henri Eyraud. Normalement, il aurait dû prendre la porte avec Garcia, dans un monde normal.
Je tiens à remercier Walid Acherchour (@walidacherchour) de sa disponibilité ainsi que pour avoir pris le temps de répondre à nos questions.