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Episode 4 : Entre procès et retour à la Commanderie

Peuple Olympien lance la série : Nanard : l’intrépide roublard, qui retrace le parcours à l’OM de l’influent Bernard Tapie. Quatrième et dernier épisode dédié au procès sur l’affaire des comptes de l’OM et à son bref retour au club quelques années après.

L’odeur de la barre des accusés, Bernard Tapie ne la connaît que trop bien. Le revoilà face à un juge qui l’interroge sur la gestion financière du club marseillais. Le goût acre de ses aveux concernant l’affaire VA-OM résonne encore. Cette fois, il est mis en cause pour un gros coup. Une histoire à 100 millions de francs. C’est donc un énième retour au palais de justice.

Galère dans la cellule

Avant d’y aller, je pensais que la prison c’était dur, mais pas à ce point-là. C’est un calvaire.

Bernard Tapie

En pleine promenade, Nanard ne peut qu’observer l’horizon noir et lugubre. Il purge sa peine de huit mois ferme et navigue entre les quartiers dédié aux personnalités publiques de la Santé, de Luynes et des Beaumettes. Par conséquent, il se retrouve seul dans 9m² et ne croise pas grand monde dans les enceintes pénitentiaires.

Le parloir lui est ouvert trois fois par semaine, pour venir éclairer une sombre routine. Seule sa famille est autorisée à le voir, mais pas de quoi apporter un parcelle suffisante de bonheur. La justice ne le lâche pas, en marge il essuie l’affaire du Phocéa.

Loin de ses bureaux dans la capitale, loin de la Commanderie, les fauteuils en cuir moelleux sont remplacés par un lit en métal rouillé. Les baies vitrées qui donnent vue sur la Seine ou les plaines marseillaises sont remplacées par des barreaux en fer forgé. Nanard, triste, peut tout de même compter sur le soutien d’adorateurs ou sympathisants. Il dit recevoir plus de 15 000 lettres, presque toutes positives à son égard. Pas étonnant, malgré ses déboires avec la justice, l’homme d’affaires est apprécié des Français.

Les faits reprochés

Nanard est un « homme tyrannique » après De Mongolfier. C’est au tour de la juge Kitanoff de critiquer en long et en large Bernard Tapie. Une nouvelle fois, ca se resserre sur le Séquano-Dionysien d’origine. La justice lui reproche une gestion malsaine et illégale des comptes de l’OM. Tout est analysé, scruté. Chaque document comptable, facture, contrat est observé à la loupe. Il est accusé d’avoir fait disparaître des comptes de l’OM plus de 100 millions de francs.

En mai 1997, les décisionnaires du club sont fichés comme membres d’une « délinquance financière particulièrement structurée ». Accusés de détournement de fonds, de minimisation de contrats, faux, abus de biens sociaux et tout un lot de malversations financières. De Jean-Pierre Bernès, en passant par Michel Hidalgo ou l’agent de joueur Alain Migliaccio, tous sont dans les petits papiers de la procureure.

Un procès et des larmes

Essoufflé, voix brisée et exténué, Bernard Tapie n’a plus aucun recours. L’étau se resserre et la machine judiciaire le compresse. Pour la procureure Kitanoff, ses discours sur sa bonne gestion des comptes, sur l’aura apportée au club, la pérennité installée ne suffisent pas. Les écarts mis en lumière sont trop importants pour être délaissés. Le président du club a du mal à prouver qu’il n’a pas pioché dans les comptes à des fins personnelles. Du yacht, aux dépenses pour sa famille, Bernard Tapie est en train de couler.

Au procès, c’est toute la tension qui remonte, cette tension qui domine aussi bien les accusés que le corps de justice. Les protagonistes paraissent affaiblis.

Bernard trop malade, ne peut assister au procès

À la prison des Baumettes, l’homme d’affaires est en incapacité physique de se rendre au procès. Nanard fait face à des problèmes cardiaques. C’est à distance qu’il subit les foudres de la justice. Ses avocats ont la lourde tâche d’annoncer la peine requise par Kitanoff, qui n’a pas lésiné sur la sentence. Quatre ans, dont deux ferme. Une sévérité sans précédent. Tapie est hanté par les échos de ce premier procès, dans lequel la procureure a prononcé : « Il ne s’est pas plié au système mais l’a façonné et l’a perverti ». Dévasté, mais orgueilleux, il assume les deux millions de francs d’amende infligés.

Quant au reste de l’équipe, ils sont condamnés, lors du procès en première instance pour avoir contribué, par le biais de fausses factures et de prêts fictifs liés aux transferts de joueurs, au détournement de 101 millions de francs au préjudice de l’OM. Le tout entre 1987 et 1993.

Un total de 88,5 millions doit être payé solidairement par les condamnés au commissaire à l’exécution du plan de l’OM, placé en redressement judiciaire en 1995. Derrière la chute du Boss, c’est tout un système qui s’effondre. Une caste de seize décisionnaires assis confortablement se retrouvent désormais condamnés.

Peine amortie

Bernard Tapie peut souffler et tenter de s’apaiser. Malade, affaibli et « torturé » par la prison, le Boss a obtenu un répit. Dans le fond, le flou règne encore concernant les comptes de l’OM. Des manquements, erreurs, roublardises sont évidentes, mais beaucoup de faits sont impossibles à éclaircir. Lors de la seconde audience, la peine est allégée. Le 4 juin 1998, la cour d’appel d’Aix-en-Provence prononce la sentence. Tapie est condamné à trois ans d’emprisonnement avec sursis, une peine d’amende de 300.000 francs et à cinq ans de privation de droits civiques. Un soulagement total pour Nanard, bien que ses liens avec l’OM se stoppent de manière froide et incontrôlée.

Le retour du Boss

En 2000, le président Dreyfus n’instaure pas de stabilité dans le club. Des orientations et de mauvais choix stratégiques plongent le club dans le noir. Un choix sulfureux lui vient alors en tête. Il décide de rappeler un certain Bernard Tapie et de lui donner le rôle d’actionnaire associé chargé de la partie sportive. Ce statut permet à Tapie de contourner l’interdiction de gérer prononcée par plusieurs jugements à son encontre et qui court jusqu’en juin 2003. Et donc d’éviter un nouveau procès.

Les mauvais résultats sportifs du club et la mélancolie toujours présente du système Tapie pèsent sur ce choix. Ce retour provoque émoi et joie, pourtant la tâche n’est cependant pas facile pour Nanard. Le club est en perdition.

Six ans après avoir quitté l’OM, menottes aux poignets entre policiers et huissiers, Bernard Tapie ne cache pas son sourire. Tout comme les supporters qui déploient fumigènes et banderoles aux abords du stade. Robert-Louis Dreyfus avait récupéré et régénéré la marque Adidas après le passage éclair de Bernard Tapie à la tête de la marque sportive. Un retour qui prend la forme d’un renvoi d’ascenseur.

Dans un communiqué, Bernard Tapie reste discret et tient à ne pas s’éparpiller.

J’accepte avec beaucoup d’émotion. je suis conscient de l’attente de tous ceux qui aiment l’OM et je suis certain que toutes les énergies convergeront vers le club.

Bernard Tapie

De Noël le Graët, en passant par l’actuel président Gérard Bourgoin, le maire de Marseille Jean-Claude Gaudin et les anciennes gloires de l’OM, tous se félicitent de cette décision.

Il ne faut pas se leurrer, Bernard Tapie retrouve un club en déliquescence sportive et financière. Peu de victoires et de titres sont enregistrés depuis 1993. Il est dur de sauver un club déjà noyé dans la catastrophe.

Pas de miracle

La prophétie ne s’est pas réalisée. L’OM s’est maintenu dans l’élite pour la saison 2000-2001 et a trouvé la neuvième place la saison suivante. L’officieux directeur sportif n’a pas pu créer ce sursaut olympien. Les marches sont trop proches du précipice pour sauver quoi que ce soit. Entre l’affaire Nouma ou Skoro, les magouilles en tout genre et une équipe qui se bat avec ses adversaires plus facilement qu’elle ne gagne, c’est très compliqué pour l’homme d’affaires.

Face aux gros du championnat, l’OM ne voit pas la lumière et s’effondre face à un Lyon qui entame son hégémonie. Bernard Tapie est déçu. Le club titube et il ne peut rien changer. Eloigné des transferts, son grand fort, il ne s’occupe que du « sportif ».

J’ai quitté un club qui était le premier d’Europe, je retrouve huit ans plus tard un asile d’aliénés. C’est plus de médecins que de policiers dont l’OM a besoin.

Bernard Tapie, propos rapportés par Libération

Il ne peut pas être plus clair, l’OM n’est pas à reformer, mais à purger. Nanard, bien que roublard et intrépide n’a plus la volonté et les épaules pour s’y mettre. Entre deux litiges Ceccaldi/Dubiton il s’éloigne du club. S’écartant ainsi de l’ombre et la grisaille qui ronge le club. En juin 2002, il quitte l’OM, mais il part la tête haute et son image le suivra pour toujours.

Véritable légende

Bernard Tapie est une véritable légende du club, mué en « Boss » depuis son arrivée à la fin des années 80, il reste aujourd’hui indétrônable dans le cœur du peuple olympien. Sa volonté, son espièglerie, son vice, son sens des affaires définissent le monstre aimant et attachant qu’il est. Toujours à l’affût lorsqu’il faut apporter conseil, anecdotes concernant le club, il fait aujourd’hui face à des soucis de santé importants. Ses plus gros combats sont contre le cancer. Sa force naturelle, son abnégation et son mental lui sont utiles dans cette épreuve.

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