L’OM retrouve l’Europa League ce soir et sera opposé au Lokomotiv Moscou. L’occasion pour nous d’analyser une écurie russe en pleine métamorphose. Quelles seront les chances de l’OM pour ce match ?
Un nouveau cycle
Après une troisième place en Premier Liga la saison dernière, le Lokomotiv Moscou affiche une certaine régularité au sein de la ligue russe. En effet, cela fait maintenant cinq ans que l’équipe termine sur le podium, s’octroyant donc une place en coupe d’Europe. Pourtant, depuis leur dernier sacre en 2017/2018, l’écurie de la capitale n’a jamais atteint à nouveau cette distinction. Et si les résultats sportifs restaient satisfaisants pour un club de ce calibre, un léger déclin se faisait sentir au fur et à mesure des années, autant dans le fond du jeu que dans sa forme.
Une refonte des instances dirigeantes
C’est pourquoi il s’opère un profond changement au cœur même du club. Ce renouveau est dans un premier temps marqué par la nomination de Marko Nikolic à la tête de l’équipe première dès l’été 2020. Le Serbe modifie alors une partie du staff dont l’objectif consistera à étayer plus facilement ses idées de jeu. Le club révèle un nouvel organigramme à l’hiver 2020. Des choix radicaux, comme le recrutement d’un nouveau directeur exécutif et d’un jeune président du comité directeur. Une refonte de la stratégie politique du club qui s’accompagne de récents objectifs mis à jour.
D’un point de vue sportif, l’évolution s’opère majoritairement à l’été 2021. Des liens allemands sont tissés notamment par l’arrivée de Tomas Zorn au poste de directeur technique ou encore Ralf Rangnick en qualité de directeur des sports et de la communication. Mais surtout, le remaniement complet de la cellule de recrutement durant ce mercato marque le changement de stratégie mis en place par les dirigeants. Certains recruteurs ont d’ailleurs été des essentiels pour s’attacher le service de joueurs.
De gros mouvements sur le marché estival
Forts de leur qualification en Europa League, les Russes ont marqué le coup lors du mercato d’été. De manière conséquente, puisque ce sont pas moins de neuf recrues qui ont débarqué à Moscou ! Des cibles disparates tant dans le profil que dans les positions sur le terrain. Ces renforts de poids se sont déjà intégrés dans la rotation, effectuant même de bonnes prestations pour certains. Observons dans le détail l’apport de ces nouveaux éléments.
Recrues prometteuses…
Konstantin Maradishvili : Le jeune milieu défensif est la dernière recrue du Lokomotiv. Transféré il y a deux semaines en provenance du rival CSKA Moscou, il est également régulièrement appelé avec les U21 russes. Titulaire presque indiscutable lors du dernier exercice avec 26 apparitions, il vient renforcer l’entre-jeu et s’offre comme une alternative crédible après le départ d’un ancien parisien. Un vrai pari sur l’avenir, puisque son club n’a pas hésité à débourser 7 millions d’euros pour s’attacher ses services.
Alexis Beka Beka : Petite révélation lors des Jeux Olympiques malgré le fiasco français, le projet du club russe a tenté le milieu de 20 ans. Arrivé de Caen après seulement 30 petits matchs de Ligue 2, il vient s’inscrire dans la durée ici avec un contrat portant jusqu’en 2026. Estimé à seulement 800 000 euros, il rejoint le Lokomotiv Moscou pour pas moins de 6 millions d’euros. De gros changements dans le cœur du jeune, avec des choix de fraîcheur mais qui manquent logiquement d’expérience européenne. Le Français sait aussi dépanner au poste de latéral droit lorsque nécessaire, comme face au Dynamo Moscou il y a deux semaines.
…et profils intéressants
Gyrano Kerk : Un profil bien plus offensif est venu renforcer les rangs moscovites. Kerk est auteur d’une très belle saison 2020 en Eredivisie avec Utrecht. Attaquant polyvalent, il a inscrit huit buts et a délivré six caviars lors du dernier exercice néerlandais. Il vient d’ailleurs se glisser parmi les plus grosses valeurs marchandes du club, répertorié à 6 millions d’euros. Habitué à jouer sur l’aile droite, Kerk peut aussi évoluer en tant qu’avant-centre voire ailier droit. Pour ses premiers matchs avec son nouveau club, il a surtout été positionné en association avec Smolov.
Tin Jedvaj : Recruté à Leverkusen pour trois petits millions, le nouveau recruteur Matthias Wallenwein a été décisif dans ce dossier. Le Croate vient solidifier une défense assez poreuse l’an passé. Déjà titularisé à plusieurs reprises, ses connaissances du poste de latéral droit font de lui un profil similaire à Lucas Hernandez, endurant et combattif.
On pourra encore citer Nair Tiknizyan, Maksim Nenakhov ou bien le prêt de Tino Anjorin en provenance de Chelsea.
Un volet agité dans le sens des arrivées, qui vient combler le départ de plusieurs cadres. En effet, le Lokomotiv s’est séparé de plusieurs de ses joueurs phares tels que Grzegorz Krychowiak, Vedran Corluka ou encore Éder dont on garde de bien mauvais souvenirs… Le club a donc investi massivement pour changer sa dynamique. Mis en lumière par les coupes européennes, les dirigeants souhaitent un meilleur statut national, allant donc dénicher des jeunes joueurs prometteurs pour pallier le départ de joueurs cadres.
Une bonne dynamique
Le dernier match
Lors de leur dernière apparition, le Lokomotiv s’est imposé 2-0 à domicile face à Samara. Cependant, malgré les apparences, le résultat apparaît moins convainquant lorsqu’on a vu le match. Rappelons dans un premier temps que la modeste formation de Samara est un promu cette année, après avoir remporté la FNL avec pas moins de 101 points. Une différence de niveau conséquente donc, entre une formation qui joue le titre chaque année lorsque l’autre vise le maintien.
De plus, on peut dire que la physionomie du match a été favorable aux coéquipiers de Smolov. Si le clean sheet laisse présager un match à sens unique, la défense des champions 2018 a été bien ébranlée. En témoigne les 18 tirs subis par le Lokomotiv, statistique encore plus marquante lorsque l’on sait que la formation n’a elle frappé qu’à 17 reprises au cours de la rencontre. Le buteur russe a d’ailleurs tenté sa chance à cinq reprises sans succès. De manière générale, le Lokomotiv a beaucoup tiré au but lorsqu’ils avaient la possession du ballon. Mais paradoxalement ils ont concédé beaucoup de coups de pied arrêtés proches de leur surface.
D’un autre côté leur match reste très satisfaisant, avec des grosses prestations du gardien Guilherme, et de la charnière centrale Jedvaj – Magkeev. Ils exerçaient quand même un certain contrôle, dans la mesure où ils ont effectué 203 passes de plus que leurs adversaires avec en moyenne six passes consécutives. Kamano, sur le banc au coup d’envoi, s’est offert un doublé. Une alternative intéressante par son efficacité devant les cages adverses.
Quelques données statistiques
Si on s’intéresse intrinsèquement au positionnement réel des joueurs au cours du match, on remarque un regroupement des joueurs au niveau du milieu de terrain. Individuellement, le latéral gauche Tiknizyan se retrouve bien plus haut que son compère Zhivoglyadov à gauche. Le numéro 17 Zhemaletdinov, ailier droit, se trouve en moyenne très axial pour épaissir le cœur du jeu. En attaque, Smolov et Kerk s’associaient pour cette rencontre. Le numéro 9 s’est retrouvé en retrait de son partenaire, et très bas sur le terrain.
Pour contraster, ils possèdent une facilité à étirer le bloc pour utiliser la largeur. En effet, sur ce match l’espace le moins utilisé était le centre du terrain ! La sollicitation la plus forte s’est portée sur les ailiers, notamment avec des dédoublements sur le côté gauche. Une capacité à s’adapter à son adversaire assez peu commune puisque leur style de jeu était loin de leurs standard sur la saison en cours. Ils ont exploité au maximum la profondeur et le résultat est la preuve de leur efficacité.
Une tactique au point
Avec des joueurs agiles et tranchants sur les ailes, le Lokomotiv utilise à bon escient les espaces libérés dans les couloirs. Une vue plus globale révèle que les offensives russes sont assez équilibrées, quoique légèrement plus fréquentes à droite (40% des attaques). Les adversaires de l’OM sont capables de construire en étirant le jeu mais aussi à l’aide d’une succession de passes courtes dans l’axe.
Des schémas de jeu facilités par leur dispositif.
Les rouges et verts évoluent habituellement en 4-4-2 modulable en 4-2-2-2 à souhait. Ils alternent donc entre largeur conséquente et regroupement axial avec des circuits de passes en escalier généralement. Sans le ballon, les deux lignes défensives sont alignées et organisées de telle sorte qu’un pressing individuel est mis en place lorsque l’équipe adverse s’approche de la surface de réparation. Capable de jouer plus bas également, les deux sentinelles tentent de couper les lignes de passe adverses en anticipant. Toutefois cette activité crée en contre-partie des espaces entre les blocs qui peuvent tout à fait être exploités par des passes tranchantes dans les interlignes.
Comment gérer les offensives olympiennes ?
Au niveau des tirs, on voit bien la préférence axiale dans la finition des attaques. De surcroît, les tentatives se font majoritairement dans les dix-huit mètres, même si les attaquants tentent 33% des tirs en dehors de la surface. Une équipe capable de déclencher de n’importe où, et assez imprévisible sur sa façon de conclure les actions.
Cette saison, le Lokomotiv reste plutôt reculé dans ses zones d’action. On observe que les joueurs touchent 31% des ballons dans les trente mètres défensifs pour seulement 27% dans les trente derniers mètres. L’équipe prend plus son temps pour construire proprement et n’hésite pas à installer des phases de conservation du ballon à l’aide de passes latérales.
Plus spécifiquement, les Russes risquent de devoir s’adapter au plan de jeu offensif de l’OM. Avec une activité très intense des latéraux notamment sur le côté droit avec Lirola, les Marseillais ajoutent une option dans la profondeur sur l’aile. De cette manière, l’ailier gauche du Lokomotiv sera forcé à redescendre parfois très bas sur le terrain. Dans le cas contraire, le latéral devra gérer un appel excentré (Under) et un autre dans le demi-espace droit (Lirola). La pression offensive mise par les phocéens obligera sans doute Nokolić à modifier les positionnements de ses joueurs. On pourra par ailleurs s’attendre à ce que l’un des milieux défensifs vienne couvrir le couloir en s’exportant vers Lirola.
Quoiqu’il en soit, les multiples possibilités que possèdent l’OM mettront la tactique employée par le coach serbe à rude épreuve. On attend de voir qui des deux tacticiens remportera la bataille tactique.
Les joueurs à suivre
Fedor Smolov : Buteur incontesté du Lokomotiv depuis 2018, il a parfaitement débuté sa saison avec six réalisations en sept matchs. Capitaine de la sélection russe avec quinze buts à la clé, il sera sans aucun doute l’élément à observer de très près lors de cette rencontre. Technique, rapide, bon tireur de loin mais aussi subtil finisseur, c’est un attaquant très complet qui sera à la pointe de l’attaque adverse. Du haut de son expérience des gros matchs, nul doute qu’il tentera de poser le plus de problèmes possibles à la défense phocéenne. Capable de décrocher ou de jouer dans les petits espaces, il sait se faire oublier et son efficacité n’est plus à prouver. Attention à lui donc…
Dmitri Barinov : Installé dans la pointe basse du milieu de terrain, Barinov fait clairement partie des meilleurs joueurs de l’effectif. Courageux, charnu et tourné vers le collectif, il bonifie le jeu de ses partenaires à travers son activité incessante sur le terrain. Dur sur l’homme dans les duels, son agressivité peut lui faire défaut. C’est ainsi qu’il a déjà été expulsé à deux reprises en ce début de championnat. Des fautes à répétitions qui lui ont valu une suspension lors du dernier match, bénéficiant de fait d’un meilleur temps de repos. Il sera déterminé pour mettre à mal les circuits de passes de Jorge Sampaoli.
Pablo : Arrivé cet hiver de Bordeaux, le défenseur de 30 ans est resté sur sa lancée bordelaise. Cette saison, il a jusqu’à maintenant joué trois matchs entièrement, pour trois matchs nuls. Son très bon jeu de tête a grandement stabilisé la charnière russe. Bien qu’il n’ait toujours pas ouvert son compteur de but avec son nouveau club, il reste un atout par son vécu. Habitué aux profils d’attaquants rapides et puissants que connait la Ligue 1, il sait gérer les duels calmement à l’aide d’un bon positionnement. Mis au repos lors du match contre Samara, il devrait composer un mur de Moscou que les Marseillais vont coûte que coûte tenter de franchir.
Conclusion
C’est une équipe imprévisible et bien renforcée que va devoir battre l’OM ce jeudi soir. En pleine reconstruction sur tous les plans, le Lokomotiv a l’habitude de jouer l’Europe et devrait rendre la tâche difficile aux Olympiens, dans une rencontre qui pourrait être plus coriace que prévue. À vos paris !