Benfica-OM : « On ne se baigne pas deux fois dans le même fleuve »

Pour le philosophe Héraclite, l’eau d’un fleuve s’écoule constamment et les individus qui s’y baignent évoluent sans arrêt. A travers cette illustration, il entend montrer que toutes les choses de la vie sont soumises à un perpétuel changement. En sera-t-il de même pour le quart de finale de la Ligue Europa Benfica-OM ? Est-ce que l’issue sera identique aux confrontations précédentes ou verra-t-on enfin quelque chose de nouveau ?

Jamais deux sans trois (éliminations) ?

Les rencontres européennes entre Benfica et l’Olympique de Marseille n’ont jamais tourné en notre faveur. Tout le monde a en tête la terrible élimination de l’OM par le club portugais en demi-finale retour de la Coupe des Clubs Champions en 1990 ! Lors du match aller, après l’ouverture du score par Lima à la 10e minute, les Olympiens qui jouent à domicile vont faire le siège devant les buts du Benfica. Sauzée égalisera à la 14ème minute et Papin offrira le but de la victoire, en remportant son duel face au gardien portugais. L’OM aurait pu marquer à plusieurs reprises ce jour-là, notamment par le biais de Waddle qui verra l’une de ses frappes atterrir sur la barre transversale. Malheureusement, nous n’arriverons pas à creuser l’écart malgré les nombreuses occasions.

L’écart est mince et laisse présager quelques inquiétudes pour le match retour, malgré les propos se voulant rassurants de l’entraineur Gérard Gili : « Pour l’instant, nous n’avons jamais perdu un match de coupe d’Europe à l’extérieur, donc je ne vois pas pourquoi nous serions particulièrement inquiets ». Peut-être que l’expression la plus importante de cette déclaration était justement « Pour le moment » !  

Lors de la rencontre au stade de la Luz, au Portugal, malgré les nombreux assauts des Olympiens, l’OM sera éliminé par Benfica. A la 83^e minute, sur un corner tiré par Valdo et détourné par l’attaquant Magnusson, Vata, rentré en deuxième mi-temps, marquera ce but tristement célèbre de la main qui privera les Olympiens de cette finale européenne tant espérée. J’avais 18 ans à l’époque, je supportais l’OM et le lendemain, tout le lycée était en ébullition après cette défaite que nous estimions être imméritée ! Notre professeur de français avait comparé le match Benfica-OM à une tragédie de Shakespeare ! Il n’est d’ailleurs pas anodin, encore aujourd’hui, d’entendre le supporter de l’Olympique de Marseille Raph football commencer son analyse du tirage au sort des quarts de finale en déclarant sur sa chaîne : « C’est contre ce club [Benfica] que l’OM a subi le plus gros vol arbitral de son histoire ».

Il y aura une deuxième confrontation entre l’OM et Benfica en Ligue Europa durant l’année 2010, qui tournera encore une fois à l’avantage des Portugais ! L’OM arrache le match nul à Lisbonne grâce à un but de Ben Arfa à la 89^e minute et est en position favorable pour l’emporter dans un stade Vélodrome en feu lors du match retour. Niang marquera un but à la 69^e minute mais Pereira égalisera rapidement. Alors que l’on semble s’approcher logiquement des prolongations, Kardec inscrit le but de la victoire portugaise à la 89^e et les Olympiens sont de nouveau éliminés !

Est-ce que le 11 avril 2024, nous allons vivre des choses analogues à ce qui s’est passé le 18 avril 1990 et le 18 mars 2010 ou bien est-il permis de rêver, d’espérer une qualification des Olympiens qui mettrait fin à cette mauvaise série ?

Que nous est-il permis d’espérer face à Benfica ?

A la fin de l’introduction à la Critique de la raison pure, Kant pose les trois questions qui guident sa pensée : Que puis-je connaître ? Que dois-je faire ? Que m’est-il permis d’espérer ? C’est cette dernière interrogation qui nous préoccupe à présent, suite aux quatre défaites consécutives de l’OM face à Villarreal, Rennes, Paris et Lille. Que nous est-il permis d’espérer, nous, supporters olympiens, lors de la rencontre Benfica-OM qui se tiendra le jeudi 11 avril ? La question est simple et nous pouvons la poser de manière plus directe, voire plus douloureuse vu ce que nous traversons actuellement.

Pour reprendre les mots de Karl Marx, l’histoire se répète toujours, d’abord comme tragédie et ensuite comme farce. Est-ce qu’après l’élimination tragique des années 90 et 2010, nous risquons d’assister à une prestation clownesque de nos Olympiens au Portugal et revenir avec un score encore plus lourd que celui encaissé à Villarreal ? Peut-on espérer ne pas être ridicule la semaine prochaine au stade de la Luz, à Lisbonne ?

Pour certains, l’OM a d’ores et déjà perdu 4 ou 5 à 0 face au Benfica, alors que l’arbitre n’a pas encore sifflé le coup d’envoi ! Je refuse d’adhérer à ce scénario ! Les supporters, ce sont aussi celles et ceux qui aiment, respectent et croient en leur équipe, quand bien même c’est parfois douloureux. Ce sont celles et ceux qui souhaitent la victoire et soutiennent les joueurs qui mouillent le maillot, celles et ceux qui attendent le miracle, même s’il ne vient pas. Les vrais supporters, ce sont aussi celles et ceux qui ne se laissent pas affecter par la haine ou par la tristesse d’une réalité pas toujours rose en ce moment pour l’OM. Celles et ceux qui ne se disent pas que c’est foutu d’avance, que l’on va perdre à Benfica, que le pire est toujours certain !  

Après, chers amis, l’espérance et le soutien ne se font pas en ignorant les problèmes et les critiques. Il faut en effet reconnaître que certaines choses ne vont pas ! Les circonstances et les faits ne jouent pas en notre faveur ! Comme l’a très bien dit récemment notre rédacteur Quentin sur le site du Peuple Olympien, « l’OM n’avance plus » ! Les amis, je vais même y aller cash ! Comment l’équipe actuelle, qui ne compte pas un seul joueur ayant pour le moment marqué l’histoire de l’OM, va-t-elle réussir là où les équipes de 1990 et de 2010, parmi lesquelles figurent des légendes telles que Papin, Waddle, Deschamps, Di Meco, Dieng et Mandanda, ont échoué ?

Comme l’ont rappelé les journalistes du Canal Plus Football Club, les dix-sept rencontres qui ont eu lieu au Portugal entre un club français et Benfica se sont toutes soldées soit par une défaite, soit par un match nul. Aucune équipe française n’a jusqu’à présent battu les Portugais sur leur terrain. Les gars, jeudi, c’est le moment de devenir des héros en allant battre Benfica sur ses terres et essayer de sauver un peu cette saison en dents de scie ! Serez-vous capable de réaliser cet exploit, chers Olympiens ?

Serez-vous les premiers ?

Est-ce que nos joueurs actuels, qui se sont littéralement effondrés à Lille au cours de la deuxième mi-temps, seront la première équipe française à ramener une victoire du Portugal ? Je le crois fermement. Le football, c’est aussi le rêve, l’attente d’une joie possible à venir, des moments conviviaux partagés avec des amis, quelle que soit l’issue du match. Venez écouter les échanges de l’équipe des chroniqueurs de Peuple Olympien sur le Space Twitter lors des rencontres de l’OM pour voir de quoi je parle ! Ce sont de sacrés bons moments avec les auditeurs, que nous remercions chaleureusement pour leur présence !

Même si les faits me donneront peut-être tort jeudi et que nous serons pathétiques à voir, j’y aurai quand même cru, amis supporters, et, pour reprendre la fameuse réplique de Perdican dans la pièce de théâtre On ne badine pas avec l’amour d’Alfred de Musset : « On est souvent trompé en amour, souvent blessé et souvent malheureux ; mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arrière ; et on se dit : « J’ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j’ai aimé. C’est moi qui ai vécu, et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui« . Après, je ne suis pas non plus idiot et aveugle ! Il m’arrive, comme Alice, notre prolifique Community Manager, de lâcher moi aussi des « Ah ! C’est pas possible ! » sur les réseaux sociaux quand on voit les prestations de l’OM actuellement !

Il y a bien une grande différence entre les équipes de 1990 et 2010, toutes les deux premières de leur championnat l’année de la confrontation avec Benfica, alors que l’Olympique de Marseille qui jouera le 11 avril à Lisbonne est actuellement huitième. Mais l’équipe de Benfica que nous affronterons n’est pas non plus celle des précédentes décennies, ni même celle des dernières années. Di Maria est toujours là mais des joueurs tel que Enzo Hernandez ont quitté le club à la fin de la saison dernière.

De plus, les défaites 2 à 1 contre le Sporting Lisbonne ce week-end et de 5 à 0 face à Porto montrent que Benfica est loin d’être invincible cette année. Si nous arrivons conquérants, avec une bonne condition physique et un très bon état d’esprit, nous pouvons réaliser l’exploit. Il ne faudra pas se cacher derrière la fausse excuse des blessés ce jour-là. Comme l’a rappelé notre chroniqueur Mattéo avec beaucoup de lucidité sur notre Space Twitter vendredi soir : « il faudra faire avec ce que l’on a comme effectif ». En 1990, même si l’équipe olympienne n’était pas décimée comme la nôtre, il y avait quand même Gaëtan Huard qui s’était blessé avant la rencontre contre Benfica et qui avait été remplacé par Jean Castaneda, le glorieux gardien des Verts.

Tout se jouera au niveau du sursaut moral de nos joueurs, de ce que Djibril, notre chroniqueur du Peuple Olympien, appelle « la force collective » et « la justesse technique ». Des qualités qui ont cruellement manqué à l’OM ces derniers matchs. Si les joueurs travaillent avec Gasset sur la façon de construire un collectif qui croit en la victoire et se donnent les moyens d’aller chercher un résultat, en évitant de grossières erreurs individuelles et en respectant notre devise « Droit au but », à l’instar de leurs ainés de 1990 et 2010, l’histoire arrêtera de se répéter ! Gasset n’a-t-il pas dit récemment en conférence de presse « Je sais, par expérience que toute chose a une fin. ». Cela vaudra-t-il pour la mauvaise série des Olympiens face à Benfica ?

Allez l’OM !