Benoît Payan, maire de Marseille, a déclaré le 3 février dernier vouloir vendre le stade Vélodrome. Alors que l’OM serait prioritaire pour l’achat, pourquoi la ville de Marseille décide maintenant d’officialiser sa mise en vente ? Combien vaudrait le stade à ce jour ? Quel serait l’intérêt d’une acquisition et quels sont les enjeux qui l’entourent ?
Encore sous le contrôle de la ville de Marseille, la question du stade Vélodrome pose question
Une enceinte trop chère pour la municipalité
La question du stade a très souvent fait débat au coeur de la cité phocéenne. La municipalité a souhaité maintenir son contrôle, jugeant qu’il s’agit de l’un de ses symboles les plus forts et marquants. Mais depuis cet été, les Marseillais ont élu à la mairie Michèle Rubirola (coalition de gauche), remplacée ensuite par Benoît Payan, et cela semble avoir changé la donne ! En effet, la ville de Marseille a dévoilé son audit des finances au début du mois de février. Celui-ci met en avant une situation alarmante qui pose sérieusement question. Les finances de la ville étant dans le rouge, l’heure est maintenant aux décisions. La municipalité souhaite aujourd’hui diminuer ses dépenses.
Selon Payan, la mauvaise gestion financière du stade Vélodrome leur aurait coûté 93 millions d’euros. Une somme astronomique. À ce jour, l’Olympique de Marseille débourse plus de cinq millions d’euros chaque année en tant que locataire du stade. S’ajoutent également à cette somme les 20% des recettes de la billetterie (si elle dépasse les 20 millions d’euros). Selon les magistrats, elle serait beaucoup trop faible et doit passer à environ 8 millions d’euros par an pour atténuer les pertes. Avec des recettes bien trop faibles, il faut se débarrasser de ce poids au plus vite.
Je ne vendrai le stade qu’à l’Olympique de Marseille, et que si je suis sûr du projet.
Benoît Payan, lors de son intervention sur RMC
Pour la première fois, la mairie semble donc ouverte aux négociations et l’Olympique de Marseille pourrait en profiter ! Récemment, Samia Ghali, première adjointe au maire, estimait que l’enceinte ne doit être vendue qu’au propriétaire de l’OM. Ainsi, ajouter également une « clause qui dit simplement que le stade ne peut être vendu séparément ».
🗣💬 @SamiaGhali "Pour une vente du Vélodrome, il y aura des conditions, des clauses claires. La préoccupation, c'est que les clubs de supporters, pour les Marseillais populaires, doivent avoir droit d'entrer au stade Vélodrome."#RMCLive pic.twitter.com/eBWRC2svqH
— Top of the Foot (@topofthefoot) February 16, 2021
De quoi ravir les contribuables marseillais ?
En plus des cinq millions d’euros versés par l’OM, nous avons évoqué précédemment que s’ajoute également une part variable correspondant à 20% des recettes de billetterie au-delà de 20 millions d’euros par an. Cela signifie que si la somme n’est pas atteinte, le pourcentage n’est pas versé… Ce qui indexe le loyer sur les résultats du club, car nous savons bien que si les Phocéens ont de bons résultats, ils auront plus de facilité à remplir le stade et inversement. Tels étaient les derniers accords négociés entre le club et la ville. Côté dépenses, 12 millions d’euros sont versés annuellement à Arema (Bouygues) jusqu’en 2045. Ce dernier s’est notamment engagé à entretenir l’enceinte et à le maintenir aux normes.
Finalement, vous l’aurez bien compris, on observe rapidement que la somme dépensée dépasse (largement) les recettes engendrées. Et selon vous, qui va devoir payer ?
Le Vélodrome coûte des millions et des millions aux Marseillais, ce n’est pas normal.
Benoît Payan, lors de son intervention sur RMC
En plus de cela, pour l’Euro 2016, la municipalité avait mis 43 millions d’euros sur la table pour la rénovation du stade, inauguré en 2014. Des dépenses, encore et toujours… Finalement, pour renflouer les caisses et éviter un énorme gouffre financier, ce sont les contribuables marseillais qui paient. En effet, les impôts locaux et les taxes gonflent années après années pour les habitants de Marseille, ce qui pose un réel problème.
Il s’agit de la seule ville de la France à être dans un cas pareil ! 15 millions d’euros ont été « sortis de la poche des Marseillaises et des Marseillais pendant 30 ans » selon Benoît Payan. Selon lui, cette situation doit cesser. Pour remédier à cela, outre le fait d’augmenter le loyer, l’OM peut (et doit) en devenir propriétaire.
Pourquoi l’OM doit devenir propriétaire du stade Vélodrome ?
Diversifier ses revenus
Très répandu à l’étranger, c’est une pratique encore très rare en France. Aujourd’hui, seul l’Olympique Lyonnais est propriétaire de son stade au sein de l’élite du football français. Pourtant, cela offre différents avantages non-négligeables. La possibilité de développer des recettes dans d’autres domaines que le terrain pur sera alors immense. Évoquons le cas des ressources de catering. Ces sommes dégagées par la restauration et la buvette peuvent déceler un énorme potentiel si leur utilisation est bien gérée. Le club pourrait alors investir dans des loges VIP ultra modernes, dans le recrutement de restaurateurs de très haut niveau ou encore dans une nouvelle modernisation des infrastructures. Le fan ne paiera plus uniquement pour une prestation, mais pour une expérience de club, ou plutôt une expérience OM.
À l’étranger, on a pu observer le club allemand de Schalke 04 qui a décidé de miser sur ce point. Leurs fans étant des amateurs de boissons alcoolisées, ils ont décidé d’alimenter le stade en pipelines de bière, qui permettent de pouvoir en déguster devant les prestations du club local. Cette décision a permis aux spectateurs de développer un plus grand sentiment d’appartenance au club… Mais elle a aussi permis de faire bondir les consommations, et les finances de Schalke ont retrouvé le sourire. En tendant l’oreille sur les besoins des fans, des solutions peuvent être trouvées sans aucun problème. Le stade pourra devenir finalement un réel espace commercial !
Aussi, nous pouvons également évoquer les recettes liées à l’exploitation du stade. En effet, à l’image du Stade de France, l’Olympique de Marseille aura la possibilité de le prêter pour des événements de manière régulière et négociera le prix avec les organisateurs. Enfin, le club pourra générer du cash via les hospitalités avec, notamment, la création de loges VIP, la création d’un hôtel ou d’un musée OM, pourquoi pas. Ces idées peuvent être utopiques, mais soulignent les diverses possibilités d’une bonne exploitation de son stade.
Beaucoup n’apprécieront peut-être pas, d’autres diront que c’est vendre l’âme du club. Mais force est de constater que pour survivre dans le football moderne, il faut diversifier ses rentrées d’argent.
Devenir une référence au niveau européen grâce au Vélodrome ?
Dans le monde du football moderne, un grand club européen sera forcément propriétaire de son stade. En Espagne, on peut observer les géants Barcelone et le Real Madrid ou le Bayern Munich et le Borussia Dortmund en Allemagne. En Angleterre, c’est d’autant plus frappant, puisque quasiment tous les clubs de première division possèdent leur enceinte sportive. La volonté a été de rapidement pouvoir avoir la mainmise sur les activités lors des matchs, mais aussi en-dehors.
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Le fait d’être propriétaire de son stade joue aussi dans la manière dont on va être perçu. Même s’il nous est difficile de l’avouer, on constate désormais que depuis que Lyon joue dans son nouveau stade, son statut a changé. Alors, pourquoi ne pas vouloir faire partie de la cour des grands grâce au stade Vélodrome, l’un des plus beaux stades d’Europe ?
Dans un football français où les modèles économiques deviennent de plus en plus instables, Marseille a sûrement une carte à jouer. Devenir propriétaire du stade Vélodrome va pouvoir permettre au club de réaliser un énorme bond financier. Certes, sur le court terme, cela représenterait une somme colossale. Mais, à moyen et à long terme, personne ne peut se permettre de refuser la pleine exploitation de son stade. Aujourd’hui, un tel rachat n’a pas l’air d’être à l’ordre du jour pour le propriétaire Frank McCourt. Mais qu’en sera-t-il demain ?